Jacques Zwick, un destin culturel

Les Édi­tions du Ceri­sier publient un cof­fret repre­nant en quatre volumes le jour­nal de Jacques Zwick, per­son­nage mar­quant de la démo­cra­tie cultu­relle belge, inti­tu­lé « Sonates d’automne » com­plé­té d’un recueil de textes autour de son action. Retour sur cet homme enga­gé dans l’histoire sociale, poli­tique et cultu­relle de son temps.

Jacques Zwick est né en 1925 et mort à 80 ans, le 30 sep­tembre 2005. Dans sa jeu­nesse il a notam­ment été membre de la Franche cor­dée, mou­ve­ment de jeu­nesse chré­tien mixte, où il se lie­ra d’amitié avec Jacques Brel. D’abord avo­cat, il passe quelques années au Bar­reau avant de le quit­ter, déçu des len­teurs de la jus­tice et de son inadé­qua­tion avec la socié­té, pour deve­nir Secré­taire géné­ral de la Ligue des Familles de 1955 à 1988. Il s’emploiera à en faire une orga­ni­sa­tion plu­ra­liste dans ses valeurs et plus éga­li­taire dans son fonc­tion­ne­ment. Retrai­té actif, il occupe de nom­breux man­dats au sein d’institutions telles que le Bota­nique, le CBAI ou le CNCD-11.11.11 — on le sur­nom­me­ra « Mon­sieur les Pré­si­dents ». Il entame aus­si de mul­tiples pro­jets dans les domaines de l’enfance et du théâtre. Homme de culture et d’exigence en matière de jus­tice sociale, ceux qui l’ont connu le défi­nissent encore comme dis­cret et sou­riant, modeste et jovial, alliant l’humour à la pré­ci­sion, excellent ora­teur et pré­cieux conseiller.

Socia­liste « non ali­men­taire », comme Hen­ri Gold­man l’a nom­mé, il était consi­dé­ré au Par­ti Socia­liste comme un vrai mili­tant, lucide et actif, n’hésitant pas non plus à le cri­ti­quer lorsque la ligne du par­ti lui sem­blait s’éloigner de ses visées pro­gres­sistes. Dans les années 1990, il lan­ce­ra, avec son amie et col­la­bo­ra­trice Thé­rèse Man­got, la com­mis­sion inter­cul­ture de Pré­sence et action cultu­relles (PAC), des cercles de réflexions visant à mettre en place un pro­gramme poli­tique éta­blis­sant une véri­table démo­cra­tie cultu­relle dans le cadre du pro­gramme du PS. Il y invi­te­ra de nom­breux acteurs de la vie cultu­relle de gauche au sens large. Homme ouvert et par­ti­san d’un ras­sem­ble­ment large des pro­gres­sistes, chré­tiens de gauche com­pris, Jacques Zwick esti­mait en effet que la gauche ne s’arrêtait pas aux fron­tières de son parti.

UN JOURNAL CULTUREL FLEUVE

Si Jacques Zwick reste une per­sonne mar­quante de la démo­cra­tie cultu­relle belge pour tous ceux et celles qui l’ont connu, il sub­siste para­doxa­le­ment peu de traces de ses tra­vaux, de son action ou même de sa per­sonne en librai­rie ou sur internet.

Or, après sa mort, on a retrou­vé chez Jacques Zwick, dia­riste assi­du, près de 1000 pages dac­ty­lo­gra­phiées de son jour­nal. Il le rédige alors qu’il est à l’automne de sa vie, et qu’il quitte peu à peu ses fonc­tions, tout en res­tant une réfé­rence pour le monde cultu­rel belge qui conti­nue de venir le consulter.

Pour ten­ter de dif­fu­ser la vision et le sou­ve­nir de Jacques Zwick mais aus­si de tenir une pro­messe faite par Hen­ry Ing­berg et Thé­rèse Man­got, qui tenaient à le publier, les Edi­tions du Ceri­sier ont accep­té, avec le sou­tien de Pré­sence et Action Cultu­relles, d’éditer ce journal.

Mené sous la direc­tion de Roland de Bodt, Jean-Paul Gailly et Mar­tine Zwick (la fille aînée de Jacques), un tra­vail tita­nesque est alors mené pour repro­duire ce jour­nal et publier éga­le­ment un recueil de témoi­gnages. On peut ain­si accé­der au jour­nal cultu­rel d’un homme qui ne cesse de tres­ser des liens entre ce qu’il voit, ce qu’il entend, les livres qu’il lit, les films et la télé­vi­sion qu’il regarde avec ses sou­ve­nirs, avec les évè­ne­ments qu’il vit, ses obser­va­tions et ses ren­contres. Un récit fleuve qui témoigne autant d’une vie que d’une époque, d’un métier que d’une vision du monde. C’est aus­si le témoi­gnage pro­fon­dé­ment humain de celui qui déci­da de ne pas com­battre la mala­die dont il était atteint, mais de com­po­ser avec elle. Regard sin­gu­lier sur l’histoire cultu­relle de notre temps, les Sonates d’automne dépeignent éga­le­ment le fonc­tion­ne­ment et la logique du milieu cultu­rel fran­co­phone en Bel­gique. Le tout dans une écri­ture fluide dans laquelle on peut navi­guer, s’immerger, ren­trer par un bout et reprendre plus tard par un autre.

Les quatre volumes de ce jour­nal sont com­plé­tés au sein de ce cof­fret par l’ouvrage col­lec­tif Le dia­logue et l’action, un recueil de textes autour de l’homme et de son action, par d’anciens proches col­la­bo­ra­teurs, acteurs des mondes cultu­rels et amis. Le livre alterne inter­ven­tions et hom­mages, mais aus­si docu­ments rédi­gés par Jacques Zwick lui-même comme ce rap­port sur la pau­vre­té et la culture, dénon­çant avec vigueur l’inaction publique en la matière. Ven­du en cof­fret, cha­cun de ces livres peut éga­le­ment s’acquérir séparément.

Jacques Zwick, Le dialogue et l’action
Ouvrage Collectif

Jacques Zwick, Sonates d’automne (tome 1,2, 3 et 4)

Éditions le Cerisier, 2014
www.editions-du-cerisier.be

Un commentaire

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    Au point de s’être bat­tu, au sein de la Ligue, pour qu’il y ait moins de dif­fé­rence de salaires entre les plus grands et les plus petits. ??? Com­ment pou­vez-vous écrire de pareilles choses ? J’ai quit­té cette asso­cia­tion un peu avant son départ.. parce que je ne gagnais pas ma vie ! Les dif­fé­rences de salaires étaient flagrantes !

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