Actuellement l’artiste vie et travaille à Gand. Ses études le prédestinaient au métier de graveur. Pourtant, il en fut tout autrement. Arrivé tardivement à l’art, il a d’abord enseigné la photographie jusqu’au-delà de la trentaine. Dessinateur dans l’âme, il commence à se consacrer au dessin et à l’envisager comme une discipline à part entière à la fin des années 90. Ces dessins complexes s’inscrivent dans un riche héritage artistique, mais sont résolument ancrés dans le présent. Ils sont réalisés tant au crayon qu’à la gouache ou à l’encre de chine sur des cartons et bouts de papiers récupérés, des pages de vieux magazines. Les couches y sont superposées.
Les sujets de ses dessins sont parfois frappés de silence ou aveuglés. Ils sont souvent représentés telles de petites figurines face à une échelle architecturale variable, le plus souvent oppressive et imposante. Si bien que ces œuvres paraissent parfois assez cruelles, truffées de symboles, de sous-entendus et de références. Borremans n’hésite ainsi pas à réinterpréter des tableaux de Vélasquez, Goya ou Manet et fait aussi souvent référence à la littérature, à la photographie et au cinéma. Ces dernières années, et cela avec une facilité grandissante, il a fait de la peinture sa scène la plus imaginative. Ses travaux explorent des états psychologiques complexes qui mettent parfois le visiteur dans un drôle d’état : entre malaise, contemplation et vertige. L’atmosphère peut être pesante, intemporelle. Les personnages centraux semblent être impliqués dans un scénario troublant. Ils viennent en rappel, se frotter au surréalisme de René Magritte, Paul Delvaux ou encore Marcel Duchamp.
Avec ses séries d’œuvres évocatrices, ses tableaux, films, dessins, photographies, il place le visiteur dans un cosmos à la fois familier mais qui devient très vite illogique et proprement absurde. Michaël Borremans aime l’instantanéité de la photographie, dans ses compositions, le référent photographique devient souvent le sujet dominant de leur interprétation. Le sens de ses photos peut être effrayant, elles vous remplissent d’un mélange de fascination et de dégoût, comme un accident de parcours, un cadavre. « La médiocrité et le manque de sens critique craint Michaël Borremans, lamine la société en général et le monde de l’art en particulier ».
Le temps œuvrant pour lui, Borremans s’est mué en cinéaste et a créé des images mouvantes d’une beauté toute picturale. Une principale caractéristique qui relie encore plus sûrement ses films à sa peinture, c’est leur terrible silence, en relation avec l’immobilité de ses peintures. Toute une symbolique du mal-être, du malaise et de la difficulté de la communication, comme dans le théâtre surréaliste de Beckett, Jean Genet ou encore Eugène Ionesco. Les regards, absents ou fuyants, sont tournés vers l’intérieur.
À l’instar de ses toiles, ses films ne contiennent aucune narration, le terrible mutisme qui s’en dégage accorde de l’importance à l’espace et la lumière.
La mélancolie et la tristesse sont constamment présentes dans ses œuvres. Si bien que les sujets sont représentés dans des états de soumission, de manipulation, de victime, de complaisance forcée.
L’univers insondable, énigmatique de Michaël Borremans ne peut laisser insensible. On en ressort pétri d’émotions de grandeur et de décadence ! Un artiste hors pair que vous pouvez découvrir jusqu’au 3 août 2014 au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles.