Let’s Antwerp go urban !

© Ellen van den Bouwhuysen

En 2012, Sihame El Kaoua­ki­bi a été élue Anver­soise de l’an­née, au même titre que des per­son­na­li­tés comme Mat­thias Schoe­naerts, acteur anver­sois très pro­met­teur. Mais qui est-elle exac­te­ment ? Une bat­tante de 25 ans qui a créé Let’s Go Urban, une orga­ni­sa­tion tour­née vers la danse urbaine qui vise à redon­ner de l’espoir et du cœur à l’ouvrage à une jeu­nesse dés­œu­vrée. Let’s Go Urban tra­vaille avec des cen­taines de jeunes, âgés de 12 à 25 ans. Sihame El Kaoua­ki­bi fait rayon­ner autour d’elle son enthou­siasme et sa volon­té d’entreprendre. Décou­vrez plutôt !

Comment est né Let’s go urban ?

En 2008, en tant que femme de 21 ans, j’ai vu défi­ler à Anvers tant de défis sociaux à rele­ver. Des défis dont les poli­tiques ne s’étaient pas empa­rés. C’était le cas dans le sec­teur de la jeu­nesse, le sec­teur cultu­rel ou spor­tif, le bien-être, mais éga­le­ment dans l’enseignement. Dès lors, en matière d’offre d’emploi, de nom­breuses pers­pec­tives étaient et res­taient pos­sibles par rap­port aux années anté­rieures. A cette époque nous étions très loin d’imaginer que les inves­tis­se­ments que nous ferions avec les deniers publics seraient aus­si ren­tables. C’est comme ça qu’est née Let’s Go Urban, une orga­ni­sa­tion cultu­relle fla­mande. La pre­mière en Bel­gique qui aborde le défi des chan­ge­ments démo­gra­phiques (le rajeu­nis­se­ment, l’appauvrissement, l’accroissement de la diversité).

En 2012, Let’s go urban a 1000 membres à son actif, des jeunes, des enfants et adultes qui répondent en masse et avec enthou­siasme à nos offres d’ateliers internes et externes, nos for­ma­tions, nos per­for­mances en danse urbaine, musique et médias urbains.

Comment se passe cette belle aventure ?

Nous regrou­pons des jeunes très dif­fé­rents. Il y a un bon rap­port entre autoch­tones et nou­veaux Belges. Toutes les classes sociales, les reli­gions et cultures sont repré­sen­tées. Nous avons même une cen­taine d’ethnies dans l’organisation. Cette mixi­té sociale et cultu­relle est néces­saire pour construire un riche capi­tal social. Il s’agit de jeunes venant de milieux pré­ca­ri­sés. Nous les convain­quons de prendre leur vie en main et de croire en leur force. Déta­chés de leur rôle de vic­time ou de la stig­ma­ti­sa­tion, nous sou­hai­tons que ces jeunes, avec leurs com­pé­tences, atteignent ce qu’ils veulent et ce en quoi ils croient. Nous sommes extrê­me­ment vigi­lants à ce que les études et l’emploi res­tent impor­tants pour eux et res­tent un enjeu dans leur vie.

Que pensez-vous des récentes déclarations faites par Bart De Wever, celles de considérer que le hip-hop actuel incite à la criminalité ?

La seule chose que je puisse dire, c’est que les médias devraient pou­voir faire la dif­fé­rence entre le hip-hop d’une part (qui devrait conser­ver sa valeur) et d’autre part la culture urbaine. Cette der­nière est une culture de jeunes dans les villes et elle est donc très diver­si­fiée. Elle prend bien évi­dem­ment ses racines dans la culture hip-hop, mais pas exclu­si­ve­ment. Bart De Wever n’est pas le seul à dépré­cier le bling bling, comme on dit. Je le fais de temps en temps. L’étude sur le lien entre hip-hop et cri­mi­na­li­té est pour moi irre­ce­vable et ne relève pas d’une image objec­tive. Bien au contraire, nous devons nous cen­trer sur la manière dont nous valo­ri­sons les jeunes et déve­lop­pons les cultures de jeunes. C’est le seul mes­sage que je porte, et selon moi, c’est un mes­sage qui peut être com­pris par chaque politicien.

Vers quoi allons-nous si la Culture est contingentée par les autorités de la ville ?

C’est peut-être une décla­ra­tion auda­cieuse, mais selon moi la culture n’est plus acces­sible au “peuple” depuis des années. Les chiffres des fré­quen­ta­tions montrent clai­re­ment qu’il n’y a pas de réflexion socié­tale dans le domaine cultu­rel. Dans le champ social, le « nous-eux » est encore très pré­sent, nous sommes très conser­va­teurs sur ce plan-là. La peur para­lyse notre socié­té et nous savons tous que celle-ci n’est pas bonne conseillère. Il est temps que la poli­tique se remette au ser­vice des gens et qu’elle laisse les tra­vailleurs œuvrer sur le ter­rain. La poli­tique doit être plus ambi­tieuse, nous sommes en attente de résul­tats des ins­ti­tu­tions publiques finan­cées. Pour cela, il faut avant tout avoir une vision sur le long terme et cela fait défaut mal­heu­reu­se­ment. Je suis convain­cue que la nou­velle géné­ra­tion appor­te­ra un vrai changement.

Pensez-vous pouvoir un jour vous établir ailleurs qu’à Anvers ?

Abso­lu­ment, les défis sont trop grands, Anvers est une ville trop petite. Je tra­vaille depuis un an main­te­nant dans le Lim­bourg avec un cer­tain suc­cès, les résul­tats sont déjà visibles. J’imagine aus­si un pro­jet ambi­tieux pour Bruxelles qui pour­rait répondre à beau­coup de défis bruxel­lois, notam­ment dans la col­la­bo­ra­tion avec les par­te­naires locaux (écoles, poli­tiques, sec­teur pri­vé, jus­tice, médias.…). Je cherche donc à trans­po­ser mes plans pour Bruxelles qui s’adresseront tant aux jeunes qu’aux vieux.

Quelle est la perspective d’avenir de votre école ? 

Let’s Go Urban conti­nue d’évoluer comme une orga­ni­sa­tion qui pré­sente des spec­tacles qui jouent à gui­chets fer­més. Elle obtient un ren­de­ment social de valeur et laisse clai­re­ment voir les résul­tats d’un tra­vail ascen­dant (bot­tom up), avec une vision, du cou­rage, de l’audace, de la déter­mi­na­tion et les défis du lea­der­ship. L’organisation est main­te­nant un centre urbain dans la ville. Un ancrage phy­sique, dans lequel nous vou­lons asseoir un concept inno­vant pour tous les jeunes des milieux urbains. Ce centre ner­veux est le cœur de l’organisation qui veut s’étendre dans les dif­fé­rents quar­tiers de la ville. Je désire lan­cer (dans d’autres pro­vinces et avant tout à Bruxelles), un ambi­tieux pro­jet qui ren­con­tre­rait de nom­breux défis propres à la ville comme pal­lier l’abandon des études secon­daires sans aucune qua­li­fi­ca­tion, le chô­mage des jeunes, l’obésité etc.

(Tra­duit du néer­lan­dais par Anne-Lise Cydzik)

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