NEAN

Une esthétique alternative

Cinq ques­tions à NEAN, jeune artiste pro­met­teur dont les pein­tures, réa­li­sées à la bombe, révèlent une finesse et une poé­sie toute per­son­nelle. Pour enri­chir notre regard sur le monde devant l’invasion publi­ci­taire. Pour valo­ri­ser le graf­fi­ti face aux œuvres « offi­cielles », trop sou­vent réser­vées à une « élite ».

D’où te vient cette passion pour la peinture ?

À l’o­ri­gine, cela doit remon­ter à mon enfance, cette période où l’on découvre tout du monde.
À cet âge, je repré­sen­tais de façon com­pul­sive les aven­tures des héros qui ani­maient mon quo­ti­dien, mon ima­gi­na­tion était en grande par­tie ali­men­tée par le ciné­ma. Je pou­vais res­ter des heures durant à regar­der les mêmes VHS tour­ner en boucle, c’é­tait qua­si­ment de l’ordre du rituel. En repen­sant au nombre de tiroirs rem­plis de des­sins à la mai­son, je me demande si ce n’é­tait pas un peu inquié­tant (rires).

Pourquoi avoir choisi de peindre à la bombe et non au pinceau ?

À vrai dire, c’est la bombe qui s’est impo­sée d’elle-même. À l’é­poque, je sor­tais des secon­daires, mes ten­ta­tives d’é­tudes supé­rieures se sol­daient par des échecs, j’a­vais lais­sé le des­sin de côté. J’a­vais pas mal de dif­fi­cul­tés à accep­ter la vie qu’on me pro­po­sait, pas par vani­té, c’est juste que je ne m’y retrou­vais pas. En y repen­sant c’é­tait une période incon­for­table, j’a­vais le sen­ti­ment de ne m’ac­com­plir en rien.
Et puis vint la ren­contre de deux graf­feurs, ce qui a bien vite réveillé ma pas­sion pre­mière. Avec la bombe, j’a­vais la pos­si­bi­li­té de m’ex­pri­mer sur de très grands for­mats, de côtoyer un autre milieu, c’é­tait quelque chose de com­plè­te­ment nou­veau pour moi, c’est peut-être ce dont j’a­vais le plus besoin.

Ton art a‑t-il, du moins en partie, une vocation à éveiller les consciences sociales ?

Je ne pense pas avoir cette pré­ten­tion, du moins ce n’est pas uni­que­ment dans ce sens que je sou­haite orien­ter mon tra­vail. En défi­nis­sant mon art, j’ai le sen­ti­ment d’en poser les limites. Je pré­fère lar­ge­ment l’i­dée de décou­vrir l’interprétation que cha­cun se fait. Cela dit, je prends plai­sir à mettre ma pein­ture au ser­vice d’as­so­cia­tions, d’é­vè­ne­ments ayant de pareilles vocations.

Te sens tu reconnu à travers une forme d’expression picturale , par exemple dans la rue , qui par ailleurs peut être critiquée lorsqu’elle est réalisée sauvagement ?

Le graf­fi­ti souffre mal­heu­reu­se­ment de beau­coup d’in­com­pré­hen­sions. C’est sans doute dû au fait que ses dif­fé­rents acteurs n’ont pas les mêmes moti­va­tions, mais c’est aus­si selon moi ce qui fait sa plus grande richesse. Un mou­ve­ment artis­tique ins­ti­tu­tion­na­li­sé n’a pas lieu d’être s’il veut pou­voir se réin­ven­ter. Pour répondre à ta ques­tion : je me sens recon­nu lorsque quel­qu’un accepte de bri­ser les aprio­ris qu’il peut avoir vis-à-vis du graf­fi­ti et appré­cie ma pein­ture pour ce qu’elle est. C’est une erreur que de juger la beau­té d’une œuvre à sa forme d’expression.

Souhaites tu développer un art populaire comme alternative à la « grande peinture officielle », trop souvent réservée à des élites ?

Je sou­haite clai­re­ment déve­lop­per un art dans lequel cha­cun puisse se retrou­ver. Mais visi­ble­ment, la ville de Bruxelles pré­fère concé­der ses murs aux publi­ci­taires plu­tôt qu’aux artistes. Dès lors, il est dif­fi­cile de pro­po­ser une alter­na­tive à des lieux d’ex­po­si­tion dits « pri­vés », bien que des col­lec­tifs d’ar­tistes comme « Pro­pa­gan­za » dont je fais par­tie, essayent de démar­cher la ville dans ce sens. Le patri­moine de Bruxelles aurait tout à y gagner, à l’i­mage de villes comme Ber­lin ou Lis­bonne qui misent sur le street art.

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