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Voyoucratie

Dave Decat est un artiste bruxel­lois. Adepte de l’esthétique de la fata­li­té, il dévoile une vision de la socié­té par le prisme défor­mant de ses mar­gi­naux. Son ins­pi­ra­tion, il la trouve dans la « voyou­cra­tie » : les infré­quen­tables, les anar­chistes, les bagnards ou encore les van­dales. Tou­ché par les repré­sen­ta­tions bibliques san­gui­naires des Pri­mi­tifs fla­mands en étant gamin, ce sont ensuite les maga­zines sati­riques, les comics et l’univers ico­no­gra­phique du Hea­vy Metal qui vien­dront façon­ner son ima­gi­naire. Celui qui se des­si­nait des motifs old­school sur les bras finit un jour par col­la­bo­rer avec Nike et Carhartt. Ses illus­tra­tions d’Apaches, ces bandes cri­mi­nelles pari­siennes de début 1900, sont dif­fu­sées dans le monde entier. Il se trouve dès lors coin­cé dans un para­doxe : avoir popu­la­ri­sé un uni­vers incon­nu, jusqu’à en être dépos­sé­dé. Qu’importe, il se réfu­gie alors à nou­veau dans l’underground et réha­bi­lite depuis lors à sa façon la com­mu­nau­té des lou­bards des années 80.

1 / 6
Dépouille (2005).

Les Apaches sont les ancêtres des punks et autres racailles de banlieue. J’ai eu un réel coup de foudre pour les exploits de la Bande à Bonnot, ces anarchistes-braqueurs qui, en 1910, ont déclaré la guerre à la société bourgeoise et à son bras armé, la police.

Issu de la campagne Carhartt (printemps/été 2005).

2 / 6
À la fraîche (2005).

À l’exception de certains quartiers comme Montmartre, le vieux Paris a complètement disparu. J’ai donc voulu lui rendre hommage, en représentant ces lieux où les bourgeois en quête d’exotisme et de safari urbain venaient se frotter à la basse pègre.

3 / 6
Merde (2009).

Les prisonniers des bagnes étaient une main-d’œuvre gratuite et corvéable à merci. Mais ils s’insurgeaient. Ils bravaient l’interdiction des tatouages en utilisant leur corps comme étendards vivants de leur révolte.

4 / 6
La Muerte (2016).

Quand le chanteur de La Muerte m’a demandé de réaliser la pochette de Murder Machine, je n’ai pas voulu utiliser leurs anciens codes esthétiques. J’ai préféré photographier une battle jacket, ce type de veste customisée avec des écussons de groupes et/ou des messages politiques. Celle-ci a été créée en partant d’un tableau hallucinant trouvé sur une brocante. C’est aussi un hommage aux gangs du Bronx de la fin des années 70.

5 / 6
Place Maubert (2005).

Mes voyous sont mélancoliques, ils assument leur destin. Cette illustration est issue d’une série consacrée aux Apaches, où les personnages étaient séparés des décors conçus comme des plans de dessins animés.

Issu de la campagne Carhartt (printemps/été 2005).

6 / 6
Le Monte en l’air (2009).

Parti d’un ancien livre, Comment on nous vole, comment on nous tue, j’ai imaginé des affichages publicitaires qui auraient pu l’accompagner. Puis un ami m’a suggéré de remplacer « nous » par « vous » : on est dès lors passé d’un livre de conseils pour bourgeois à une sorte de guide criminel imaginaire.

 

Dave Decat, Voyoucratie.
Bruxelles, C-F-C Éditions, coll. « Strates », 2018.