1984

George Orwell

C’est une œuvre clé du 20e siècle, dont l’épilogue se situe quelque part vers 2050, quand le Par­ti publie­ra la 11e édi­tion du dic­tion­naire du néo­par­ler et quand s’achèvera l’œuvre ultime de des­truc­tion des mots et de dégrais­sage de la langue. Quand s’affirmera enfin le lan­gage offi­ciel qui aura réduit à sa plus simple expres­sion le champ de la pen­sée… 1984, le roman de George Orwell, ache­vé en 1948 et publié l’année sui­vante, est un livre qui reste ouvert sur un futur pos­sible. La logique impla­cable du sys­tème tota­li­taire qui y est décrit n’en finit pas de trou­ver de sinistres échos dans le monde d’aujourd’hui (« Si tu veux une image du futur, figure-toi une botte qui écrase un visage humain – indé­fi­ni­ment »).

C’est donc fort à‑propos que parait cette nou­velle tra­duc­tion, confiée à Josée Kamoun. Dont le prin­ci­pal mérite – mais ce n’est pas le seul – est d’avoir ren­du encore plus per­cu­tant (c’était donc pos­sible) ce chef‑d’œuvre de la dys­to­pie. L’unique tra­duc­tion fran­çaise dis­po­nible datait de 1950 (Amé­lie Audi­ber­ti). On ne s’en est jamais plaint. Mais le coup de maitre de Kamoun est d’avoir recol­lé au texte ori­gi­nal tout en fai­sant le pari d’une conju­gai­son au pré­sent. Évi­tant ain­si l’écueil d’une tra­duc­tion du pré­té­rit anglais par le clas­sique, et plus lit­té­raire, pas­sé simple. Et ça marche ! La lec­ture du roman n’avait jamais été aus­si fré­né­tique, dès les pre­mières pages nous avons été hap­pés par la machi­ne­rie impla­cable et minu­tieuse d’Orwell, dont le carac­tère conjec­tu­ral n’avait jamais paru aus­si plausible…

1984 est reve­nu frap­per à la porte de notre temps. Sa (re) lec­ture reste indispensable

Denis Dargent

1984 (nouvelle traduction)
George Orwell
Gallimard, 2018

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