Le sociologue Alain Accardo, spécialiste de la sociologie critique et de Pierre Bourdieu a publié une nouvelle édition augmentée et actualisée de son ouvrage « De notre servitude involontaire ». Il y livre une ample analyse de l’évolution du capitalisme et de la déroute des mouvements de gauche censés s’y opposer. Tout l’intérêt du livre réside dans l’interrogation permanente sur la capacité du système dominant à nous envoûter, à nous ensorceler comme l’exprimaient Isabelle Stengers et Philippe Pignare. Accardo nous pose une question centrale : « Qu’est-ce qui en moi a déjà été acheté, approprié par le système, et fait de moi un complice qui s’ignore ? ». Un système social existe toujours sous une double forme : une réalité objective, extérieure à nous mais aussi une réalité du système intérieure à nous, qui opère du dedans. Transformer l’entreprise capitaliste et l’avilissement humain qu’elle implique nécessite dès lors aussi une réforme de soi-même. Il ne s’agit pas d’un « mea culpa » moral mais d’une socioanalyse en tenant compte de la part du système à laquelle nous participons personnellement. Déconstruire les formes de l’automystification et de l’adhésion par lesquelles nous faisons corps avec la logique dominante, représente l’étape indispensable pour refuser la servitude et l’adhésion grâce auxquelles le capitalisme se dilate sans relâche.
Jean CornilDe notre servitude involontaire
Alain Accardo
Agora, 2013