Homo Metallicus

Nicolas Bénard

Avec sa veste pat­chée ou sa cein­ture de balles, le metal­head a tou­jours intri­gué. Et pour­tant, même s’il semble se tenir en marge de la socié­té, l’Homo Metal­li­cus est bel et bien le fruit de son époque. Tel pour­rait être le fil rouge de cet ouvrage. Back in the years : au début des années 80, la presse spé­cia­li­sée contri­bue aux pre­miers pas du style musi­cal en éle­vant cer­tains artistes au rang de demi-dieux. Un pan­théon voit petit à petit le jour : Iron Mai­den et Metal­li­ca prennent place aux côtés de Black Sab­bath et de Venom. Une jeu­nesse y puise de nou­veaux repères. Le groupe revêt la fonc­tion mythique du barde « exhor­tant les membres de son clan à défendre une même cause ». Mais au fil des années, le masque tombe : le musi­cien ne cultive plus la mar­gi­na­li­té, elle devient une consé­quence plus qu’un leit­mo­tiv. Frap­pées par un vent de désa­cra­li­sa­tion, les années 90 et début 2000 ver­ront appa­raitre une crois­sante rami­fi­ca­tion du Metal en divers sous-genres. Il faut conqué­rir une nou­velle aura. La scène par­fois se théâ­tra­lise par un recourt aux masques, aux dégui­se­ments et aux corpse-paints. D’un autre côté, cer­tains tentent de rendre le Metal plus audible par le grand public et per­mettent une dif­fu­sion radio. La gent fémi­nine y voit — enfin — une porte d’entrée. La viri­li­té des eigh­ties n’est plus un cri­tère d’exclusion, les femmes sont fina­le­ment recon­nues pour leur talent. Le mar­ke­ting s’infiltre insi­dieu­se­ment dans le milieu : pour vivre de son art, un groupe de Metal doit lui aus­si se plier aux dik­tats de la pro­mo­tion musi­cale. La répu­ta­tion n’est plus innée, mais se tra­vaille au corps. L’Homo Metal­li­cus est pas­sé du mythe à la réa­li­té. Armé d’une plume souple et lim­pide, Nico­las Blé­nard pro­mène son lec­to­rat au gré des évo­lu­tions de la com­mu­nau­té de ce style musi­cal. Le Doc­teur en His­toire ne lésine pas sur les récits et autres anec­dotes, ren­dant cette approche socio­lo­gique riche et vivante pour qui­conque vou­drait décou­vrir les cou­lisses de ce vaste mou­ve­ment, aty­pique à pre­mière vue, mais au final, si pro­fon­dé­ment humain.

Pierre Vangilbergen

Homo Metallicus
Du mythe à la réalité
Nicolas Bénard
Camion Blanc, 2017

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