Les marchés euphoriques, les marchés inquiets et à rassurer à coup de plan d’austérité… Mais qui sont les marchés ? Sait-on seulement qu’ils ont des noms et des adresses bien précises ? Et si on sait les identifier, pourquoi n’est-ce pas plus simple d’intervenir ? Pourquoi malgré les discours incantatoires prônant une régulation des marchés, rien ne change ? Pourquoi une différence telle entre discours anticapitalistes qu’on a vu fleurir à droite comme à gauche et les actes politiques qui les mettraient en œuvre ?
En fait, si la phrase « L’État doit reprendre la main sur la finance » est l’une des plus prononcées cette année, elle l’est en majorité par un personnel politique très investi dans le monde des affaires et qui, partant, aura du mal à abjurer ses engagements précédents. Comme jadis le sociologue américain Charles Wright Mills (L’élite du pouvoir, Les Cols blancs), Geoffrey Geuens opère une sociologie des élites et conclut à la présence d’un appareil non pas militaro-industriel, mais politico-financier. En son sein, la porosité entre milieux politiques et milieux d’affaires est totale. On ne compte plus les allers-retours entre hauts postes de compagnies (médias, énergie, distribution) et fonctions politiques déterminantes, et ce, quelle que soit la couleur politique de ses acteurs.
L’oligarchie, loin d’être un fantasme de complotistes, est une réalité qui est ici mainte fois démontrée et documentée. L’ouvrage est aussi l’occasion de monter les capacités performatives des acteurs du marché qui, par leurs discours, instituent des situations bien réelles. Il présente en outre une présentation des acteurs les plus représentatifs du capitalisme anglo-saxon qui domine actuellement et dont les imbrications entre pouvoirs publics et groupes financiers est l’une des caractéristiques principales.
Aurélien BerthierLa finance imaginaire
Anatomie du capitalisme des « marchés financiers » à l’oligarchie
Geoffrey Geuens
Aden, 2011