La révolution n’est pas finie, ce petit livre de Michel Gheude, qui écrit régulièrement dans nos pages, est un foyer incandescent d’intelligence et de sensibilité. Je l’ai lu d’une traite. Un bonheur authentique de la lecture et des mots, des références et des anecdotes, des analyses et des citations qui m’ont enchanté. Dès les premières lignes, la thèse est posée : « l’origine de la liberté humaine est dans la langue ». Je l’ai compris comme un cercle qui ne cesse de s’élargir. Le langage, poétique comme politique, résonne comme une pierre lancée au cœur de la condition humaine et qui ne cesse de diffuser des ondes, circulaires à l’infini, de résistances, de beautés et d’intelligibilités.
Ces pages voyagent de Robespierre à Pasolini, de Lou Reed à Maïakovski, de Marcel Hicter à Game of Thrones, de Sade à Sartre, de la création des journaux à la littérature des poilus, de l’Europe économique à notre utopie américaine. « La culture est un champ de bataille. Culture contre culture… » écrit Michel Gheude. Certes, mais j’ai ressenti ce conflit comme une farouche volonté d’élargissements successifs et non comme des rapetissements crispés sur des identités culturelles closes. Une addition et non une exclusion. Plutôt du et que du ou. Une culture aussi comme un formidable refus de toutes les oppressions, et singulièrement des totalitarismes qui ont martyrisé le 20e siècle.
Je ne partage pas toutes les thèses de Michel, d’où le plaisir sans cesse renouvelé d’un dialogue dynamique, notamment sur le rapport à la nature ou aux technosciences. Mais j’adhère totalement à sa vision de la culture comme invitation permanente à l’émancipation. Et puis, ce texte infuse en moi, m’interroge, fait bouger mes lignes, crée des fissures dans mes certitudes. « La mondialisation fait peur parce qu’aux yeux de beaucoup, elle signifie moins l’élargissement du monde humain que sa clôture définitive » affirme Michel Gheude. Merci l’ami pour ces paroles fertiles qui encouragent à l’élargissement des consciences. Un rayon d’optimisme qui éclaire des pensées parfois trop noires.
La révolution n'est pas finie
Culture et émancipation
Michel Gheude
Espace de Libertés, 2015