Luttes des classes

Ascanio Celestini, Iacopo Bruno & Salomé Crickx

Deux minutes qua­rante seconde d’appel pour 0,85 cen­times d’euros, voi­là la seule don­née utile pour les tra­vailleurs et tra­vailleuses de call cen­ter dépeints dans cette nou­velle fable sociale de Celes­ti­ni. Dans ce récit, on nous plonge — non sans stress — dans le quo­ti­dien violent et déshu­ma­ni­sé d’un centre d’appels ita­lien. Deux ten­sions de notre socié­té se mêlent à tra­vers une mise en scène mini­ma­liste, presque intime : le démem­bre­ment du tra­vail et du sala­riat d’un côté, et le sexisme de l’autre. Un texte dense et sans répit, comme les écrit si bien Celes­ti­ni, qui empêche presque de pen­ser, qui frappe comme une claque mais qui nous reste en tête, qui nous ques­tionne sur le monde et ses dérives. Bru­no Iaco­po, l’acteur et Salo­mé Cri­ckx, l’actrice incarnent des per­son­nages tristes et désa­bu­sés, presque pathé­tiques. Sur fond de restruc­tu­ra­tion, de négo­cia­tion et de renon­ce­ment, ce récit met en lumière un retour à des condi­tions de tra­vail qu’on pen­sait révo­lues et qui se réins­tallent insi­dieu­se­ment dans des sec­teurs de l’ombre au détri­ment des tra­vailleurs et tra­vailleuses précarisé·es. Si le call cen­ter est un sym­bole bien connu de la crise du sala­riat et de la concer­ta­tion sociale, il est bon de rap­pe­ler que nous avons tous et toutes inté­rêt à résis­ter à cette pré­ca­ri­sa­tion du tra­vail qui fait tâche d’huile et gri­gnote peu à peu tous les secteurs.

Sarah de Liamchine


Luttes des classes
Une pièce d’Ascanio Celestini, adaptée et jouée par Iacopo Bruno & Salomé Crickx
Théâtre des martyrs, 2018

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