Sioen.

Gantois et enfant de Jacques Brel

Photo : Dirk Leunis

Fre­de­rik Sioen est un jeune chan­teur gan­tois, com­po­si­teur-inter­prète de 32 ans. En février der­nier, il sor­tait son qua­trième album « Sioen. ». Un album très réus­si qui risque fort de le pro­pul­ser sur le devant de la scène belge notam­ment dans la par­tie sud de notre pays où il reste encore peu connu. Ren­contre avec un gar­çon très sym­pa­thique et ouvert d’esprit.

Sioen tu viens de sortir ton quatrième album et pourtant il me semble que tu restes peu connu dans la partie francophone du pays. Peux-tu nous raconter ton parcours musical ?

Mon par­cours a débu­té très tôt, mon père était pro­fes­seur de musique. Il m’a pous­sé dans cette direc­tion. J’ai joué de la flûte tra­ver­sière, puis de la flûte clas­sique pen­dant 11 ans. À l’âge de 16 ans, j’ai com­men­cé à écou­ter de grands artistes, j’ai ensuite rejoint un groupe de rock dans lequel j’ai chan­té et com­po­sé des mélo­dies sur mon pia­no. Je me suis pro­duit en concert pour la pre­mière fois en 2000, aujourd’hui voi­là déjà 12 ans que Sioen l’ar­tiste existe, le temps passe vrai­ment vite. À l’instar de beau­coup d’ar­tistes, j’ai eu la chance de jouer dans des fes­ti­vals comme les Rocka­lies au Havre et j’ai fait énor­mé­ment d’autres concerts avant la paru­tion de mon pre­mier album.

Essentiellement au Nord du pays ?

Oui, sim­ple­ment en pia­no voix, j’ai com­men­cé à jouer par­tout où je pou­vais, sur­tout à Gand où j’ha­bite. Dans les bars, j’a­vais mon propre jour de pro­gram­mé où je me pro­dui­sais en live. Cela m’a per­mis de ren­con­trer mes pre­miers fans. Au début, on m’a dit de me pro­duire au maxi­mum et en prio­ri­té à Gand ou à Lou­vain car c’est là que la popu­la­tion estu­dian­tine est la plus forte. Ce qui est encou­ra­geant avec un public comme les jeunes, c’est qu’ils achètent ta démo et l’é­coute direc­te­ment en ren­trant chez eux. Quand j’ai sor­ti l’al­bum en 2003, il était déjà très atten­du par le public, donc si je peux don­ner un conseil aux jeunes musi­ciens, ce serait de mul­ti­plier le plus pos­sible le nombre de petits concerts afin acqué­rir de l’ex­pé­rience et voir com­ment les gens accueillent votre musique. Pour moi la musique doit avant tout tou­cher les gens. Gérard Mor­tier actuel­le­ment direc­teur de l’opéra de Paris m’a dit « Sioen tu n’es pas un musi­cien de pop tu es un ‘’Tam­bour’’ ». Cette réplique a certes une teinte médié­vale, mais je la prends comme un com­pli­ment. En effet, je ne me consi­dère pas comme un show­man, je pré­fère être proche du public. C’est comme un art qui unit le public et la musique. Je ne veux pas créer des choses arti­fi­cielles, mais de vraies émo­tions, des choses concrètes.

Tu es un artiste engagé contre le racisme avec entre autres Arno et Tom Barman (le chanteur de Deus). Tu t’investis aussi dans des campagnes comme celles d’Oxfam international. Quel type de message veux-tu faire passer ?

C’est pour moi quelque chose qui va de pair avec le public, je m’i­den­ti­fie d’ailleurs à mes idoles de la musique comme Bob Dylan ou Bob Mar­ley, des groupes et des artistes aux textes enga­gés. Per­son­nel­le­ment j’ai aus­si eu une édu­ca­tion très ouverte socia­le­ment par­lant. Ain­si quand nous jouions en concerts, nous don­nions une par­tie des béné­fices pour ce type de causes. J’ai d’autres pro­jets avec Oxfam ou Bel­ga­vox dans les­quels nous allons col­la­bo­rer avec des musi­ciens afri­cains. C’est là une belle occa­sion de décou­vrir une nou­velle culture. La musique n’a pas de fron­tières et c’est ce qui me plaît. La musique me donne un ali­bi pour être un chan­teur enga­gé, entendre sim­ple­ment mes mor­ceaux dif­fu­sés sur les ondes, cela ne me suf­fit pas à me sen­tir utile.

Quelles sont tes influences et tes références musicales ?

C’est dif­fi­cile de par­ler de réfé­rences. J’ai mon uni­vers, je joue sim­ple­ment avec mon pia­no. C’est ce qui donne une cou­leur spé­ci­fique à ma musique. Mais j’aime des tas d’autres styles comme le funk, la musique clas­sique, en réa­li­té Je suis très ouvert ! Le mélange des genres per­met d’ob­te­nir une sorte de mélan­co­lie. Un style par­ti­cu­lier ne me per­met pas de lais­ser une empreinte. Mon idole, c’est Damon Albarn de Blur et Gorillaz. C’est quel­qu’un de très enga­gé, il ne s’est pas lais­sé caser dans un style unique. En géné­ral, on ne parle pas d’un style mais d’une iden­ti­té. Je me sens Gan­tois mais je me sens aus­si enfant de Jacques Brel ! Je me sens belge, euro­péen et dans mes concerts et ma musique, je sou­haite insis­ter sur le fait que nous ne sommes pas wal­lons ou fla­mands mais belges avant tout.

www.youtube.com/watch?v=uKuCRzDN0cY

As-tu des contacts avec des artistes francophones ?

J’ai fait la pre­mière par­tie de Girls in Hawaii. J’ai joué éga­le­ment avec Shar­ko à Paris et fais une tour­née avec Pug­gy. Je connais les artistes et j’es­saie au maxi­mum de les suivre mais ce n’est pas évident car les médias sont divi­sés. On res­sent tou­jours cette cas­sure lin­guis­tique. Je trouve que nous devons sti­mu­ler des échanges. Faire le contraire est stu­pide, nous devrions nous sou­te­nir davan­tage les uns les autres. C’est une façon de pen­ser qui doit débu­ter très jeune, il faut favo­ri­ser les rap­ports mais je ne me fais pas de sou­cis car les jeunes d’au­jourd’­hui ont beau­coup d’éner­gie positive.

Est-ce que tu connais le projet de la ministre de la culture Fadila Lanaan qui propose qu’un certain quota de groupes ou chanteurs néerlandophones passent sur les ondes francophones et vice et-versa ?

Non, mais c’est une excel­lente idée ! C’est bizarre car quand je joue à l’é­tran­ger tout le monde parle d’un groupe belge et non d’un groupe linguistique.

Passons à ton nouvel album intitulé « Sioen. ». Considères-tu que c’est ton album le plus abouti ?

C’est l’al­bum le plus repré­sen­ta­tif de ce que je suis. Après ma col­la­bo­ra­tion avec les musi­ciens afri­cains, j’ai eu une longue pause lors de laquelle j’ai pu réflé­chir à ce que je vou­lais faire et dire. Je vou­lais par­ler de mon pas­sage à la tren­taine, faire décou­vrir qui est vrai­ment Sioen. J’ai tra­vaillé éga­le­ment avec d’autres artistes, c’était comme si je me regar­dais dans un miroir et je me suis com­pa­ré à eux pour mettre en avant mes fai­blesses, mes qua­li­tés.… Comme j’é­cris mes textes, j’ai vou­lu par­ler de moi sans me four­voyer, je suis heu­reux car mes amis estiment que cet album est celui qui me res­semble le plus.

Quels sont les thèmes abordés dans cet album ?

C’est cli­ché mais c’est en grande par­tie l’a­mour. L’a­mour d’une femme, l’a­mour de la vie… L’a­mour c’est quelque chose de posi­tif et c’est grâce à la posi­ti­vi­té que l’on réus­sit ce que l’on entreprend.

Est-ce que cet album marche bien ?

J’ai beau­coup de plai­sir car je sens que les gens ont com­pris l’al­bum et ce n’est pas sou­vent le cas. Cela me rend vrai­ment heu­reux quand on me dit que ma musique donne l’im­pres­sion d’être trans­por­té en Été… Je ne fais pas de la house music qui pas­se­rait dans les dis­co­thèques, je pré­fère qu’on assi­mile ma musique à quelque chose de fes­tif et joyeux.

Tu as réalisé un clip avec le chorégraphe Alain Platel, tu t’intéresses vraiment à la danse ? Tu l’as pratiquée ?

Je ne l’ai pas pra­ti­quée, mais quand j’a­vais 15 ans, je dis­tri­buais des flyers comme petit job et c’est là que j’ai eu l’oc­ca­sion de le ren­con­trer au théâtre, je suis deve­nu très vite fan. Par la suite, puisqu’il est lui aus­si gan­tois, nous avons noué beau­coup de contacts. C’est quel­qu’un d’im­por­tant pour moi car il est très humain. J’aime son éner­gie et j’aime le faire connaître aux autres. Cela résulte de l’ou­ver­ture d’esprit.

Quels sont tes projets scéniques dans les mois qui viennent ?

Nous avons déjà pro­gram­mé des fes­ti­vals cet été jusqu’à pré­sent sur­tout en Flandre. Je joue­rai à Gand, à Ostende, à Eupen… des dates sont déjà confir­mées mais pas encore communiquées.

Qu’est-ce que tu écoutes en ce moment ?

J’ai écou­té l’al­bum de Connan Mocka­sin. J’aime beau­coup les Fla­ming Lips

J’é­coute plein de choses, il est vrai­ment très dif­fi­cile de choisir.

Je ter­mi­ne­rais en disant que j’ai une grande envie de venir jouer en Wal­lo­nie. Je me suis déjà pro­duit aux Ardentes, aux Fran­co­fo­lies et c’é­tait génial, j’ai­me­rais renou­ve­ler l’expérience

www.sioen.net

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