Reflets

Design for Everyone — Contrer l’architecture du mépris

Grilles, pics, herses, assises indi­vi­duelles ou frac­tion­nées et, plus insi­dieu­se­ment encore, bacs ou pots de fleurs, les dis­po­si­tifs et pra­tiques visant à régu­ler les usages de l’espace com­mun voire à en exclure cer­tains usager·ères sont mul­tiples. Les inter­ven­tions que Desi­gn for Eve­ryone a com­men­cé à mener dans l’espace urbain bruxel­lois en 2018 avaient pour ambi­tion de rendre visibles ces pra­tiques et de les ques­tion­ner publi­que­ment. Le constat est sans appel. Ces traces d’un desi­gn hos­tile, qua­li­fiées d’archi­tec­ture du mépris par cer­tains auteurs, sont nom­breuses. Et le signe tan­gible d’une ville vou­lue « propre », nette » et « sûre » qui se tra­duit dans les faits par « régu­la­tion », « exclu­sion », « contrôle », taillée sur mesure pour les échanges com­mer­ciaux et les flux pro­duc­tifs. On cherche par­fois en vain des espaces de convi­via­li­té et de gra­tui­té qui, sans être exempts de conflic­tua­li­té, per­met­traient la ren­contre et les échanges entre les habitant·es et usager·ères d’un même espace.

1 / 7

Beaucoup d’ingéniosité peut servir à rendre hostile l’espace public en toute discrétion. Ici, aucune chance que ces « accoudoirs » de 5 cm de hauteur, situés sur un banc de la station de métro Maelbeek, puissent avoir une réelle utilité pour des personnes éprouvant des difficultés à se relever ni pour le confort des usager·ères...

2 / 7

C’est donc par l’entremise d’une petite intervention, tout en les laissant visibles, que nous effaçons ces séparations pour rendre à ces bancs un potentiel usage différent. Non pas que s’allonger sur un banc soit une solution acceptable pour celles et ceux qui n’auraient d’autres choix, mais exclure cette possibilité pour les chasser nous semble indigne et nos actions ont pour but de rendre visible ce choix que nous voulons questionner.

3 / 7

L’effet direct de ce type de dispositif et de ses multiples variantes que l’on retrouve un peu partout sur les bases de vitrines ou sur des appuis de fenêtre est bien sûr d’empêcher le stationnement de personnes jugées indésirables. L’effet indirect, c’est d’être le signe d’une société ou certaines ne sont pas les bienvenu·es et d’avoir une influence sur la perception que nous avons les uns des autres dans l’espace public. Ils nous impactent toutes et tous.

4 / 7

L’intervention de Design for Everyone a consisté dans ce cas à transformer l’aménagement en attraction touristique de l’hypercentre, en tant que témoin d’un passé que nous espérons un jour révolu. La structure laisse visible le dispositif initial pour que chacune puisse admirer ce « Patrimoine exceptionnel de l’(in)humanité ».

5 / 7

Si certaines de nos interventions ont été préparées et construites en toute discrétion dans des caves ou des garages, d’autres ont été construites lors d’ateliers participatifs dans l’espace public. La conception et la réalisation des structures sont alors l’occasion d’échanges et de partages avec le public en cohérence avec notre souhait de questionner l’aménagement urbain. A contrario, l’installation en elle-même se doit d’être faite le plus rapidement possible au risque d’en être empêchés.

6 / 7

Bien que nos interventions aient toujours été gracieusement offertes et inoffensives, respectant l’intégrité de l’existant, elles ne sont jamais restées bien longtemps dans l’espace public. Pour continuer à leur donner une visibilité, nous avons réuni une série exemplative des dispositifs existants dans une carte : la Brussel’s Prout Map.

7 / 7

Design for Everyone est par ailleurs un produit d’exportation porteur et participe donc au rayonnement international de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Ici en action à Lyon à l’invitation de l’association d’éducation populaire Robins des Villes pour réparer les parties manquantes d’un banc.

Vous pouvez suivre le projet Design for everyone sur leur site et sur leur page Facebook