Reflets

Le Bureau des colères

Pen­dant tout le mois d’avril 2021 des habitant·es de Saint-Josse et de la Région Bruxel­loise ont dépo­sé leurs colères secrètes ou actes de vio­lence refou­lés au Bureau des colères. Le Bureau des colères inves­tit des vitrines vides mais est aus­si mobile. Il va à la ren­contre des asso­cia­tions, rejoint des mani­fes­ta­tions, s’installe en rue… Il trans­forme vos visions intimes en recons­ti­tu­tions pho­to­gra­phiques publiques. Le Bureau des colères s’auto-déclare « ser­vice artis­tique à la popu­la­tion » et sou­haite explo­rer les liens que peuvent entre­te­nir vio­lence et repré­sen­ta­tion, tout en met­tant en évi­dence les urgences sociales de la ville.

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Démarche anonyme, toute intention de violence non réalisée est acceptée dans la base de données. Qu’elle vise des objets ou des lieux, des figures familiales ou des personnalités du monde médiatique et politique, des institutions ou entreprises, des forces colonisatrices, morales, biologiques, technologiques ou magiques, …

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Les deux artistes s’entretiennent avec les passant·es au fil d’un questionnaire administratif qui fixe les origines de la colère tout en ciblant un moment où la colère déborde.

« Pensez-vous à un moment en particulier où ces émotions vous ont poussé·e à bout et où vous vous êtes vu·e faire un acte de rupture, de fuite, de violence ? »

 

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Le questionnaire se poursuit avec la description précise de la vision. C’est sur cette base que les mises en scène photographiques sont imaginées, comme des commémorations préventives. Les colères sont alors rejouées par des figurant·es trouvé·es à l’aide de portraits robots. Le bureau se transforme en studio photo. « Qui fait l’acte ? Est-ce bien vous ? Comment est votre corps ? Que ressentez-vous ? »

 

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Colère de Maman n° 071054

« J’ai contacté ma mutuelle plusieurs mois avant d’accoucher pour anticiper mon congé maternité. S’en est suivi un calvaire administratif pour avoir les bonnes infos et un suivi cohérent de mon dossier. J’ai au final été trois mois sans salaire avec un nouveau-né. C’est pas la première fois que je me retrouve dans ces situations avec l’administratif. Je pense qu’avec le Corona ça devient encore plus compliqué de trouver des interlocuteurs. »

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Colère de Edward n°071235

« Je me rappelle ma première mort inutile. C’était en 2005. Une mère de famille est décédée. Je me souviens des cris des enfants. Elle était venue pour une opération simple mais elle était en soins intensifs. On avait besoin d’une place. On a dû la déplacer dans un service avec moins de surveillance. On a dû la déconnecter de cette machine. Ce qui nous vient en tête directement c’est : est-ce que ça vient de moi ? Ou est-ce le manque de moyen ? »

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Le Bureau des Colères met ensuite à disposition ses archives lors d’expositions-évènements. Plusieurs guichets permettent aux visiteur·ses de choisir des images qui les touchent et de recevoir la photocopie des dépositions complètes qui y correspondent.

« Est-ce que ça vous apaise ou vous excite de voir l’image de cet acte? Que faire de l’image ? »

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Nos colères rencontrent-elles des espaces pour s’exprimer ? La violence joue-t-elle un rôle social ? Quels liens entretiennent violence et représentation ?

Les Habitant.e.s des images souhaitent approfondir ces objets de réflexion dans une publication à venir. Vous souhaitez prendre part à cette réflexion pour partager des vécus, des références, des expérimentations... ? Écrivez ici : admin@habitants-des-images.be

À l’origine de ce projet il y a Mélanie Peduzzi (BE) et Adèle Jacot (CH). Elles ont fondé l’ASBL Habitant·es des images en 2013 à Bruxelles, structure qui développe des œuvres engagées et collaboratives en questionnant les rapports de pouvoir à travers les systèmes de représentation.