Ode à un bienfaiteur

Par Jean-François Pontegnie

Illustration : Vanya Michel

Il n’y a plus que les imbé­ciles qui l’ignorent : le réchauf­fe­ment de la Terre cause un cer­tain dérè­gle­ment cli­ma­tique. Plus moyen de savoir quand plan­ter ses choux, plus moyen de savoir s’il fera beau quand j’irai prendre un peu l’air en Thaï­lande ou pour mon trek au Maroc. Ou s’il y aura-t-il de la neige à Aspen. Va‑t’en vivre dans des condi­tions pareilles.

J’sais pas vous, mais moi ça m’agace. Et ce d’autant qu’il y a des solu­tions et que, si les gens se condui­saient un peu conve­na­ble­ment, on pour­rait limi­ter les dégâts. C’est ce qu’a très bien com­pris Elon Musk, ce Bien­fai­teur – sou­vent mal com­pris hélas – de l’Humanité.

Ca fait un paquet d’années déjà (20 ans pour être pré­cis) qu’il a vu que le petit machin qui s’appelait encore « Tes­la Motors » pour­rait deve­nir une vraie solu­tion d’avenir : un vision­naire, un génie, je vous dis. Même s’il savait qu’il fal­lait bien com­men­cer par du haut de gamme (le Road­ster) – ça s’appelle le ruis­sel­le­ment ! – il a tou­jours dit que l’ob­jec­tif à long terme de Tes­la était de créer des véhi­cules élec­triques abor­dables pour le mar­ché de masse.

D’ailleurs le Road­ster (qui res­semble vache­ment à une voi­ture de sport : de 0 à 100 km/h en 3,9 secondes, avec une vitesse de pointe à 201 km/h) a été aban­don­né. Non sans d’ailleurs qu’un exem­plaire ait été mis en orbite autour du soleil, entre la Terre et Mars. Il a le sens du durable, Elon.

Après le Road­ster : le « Model S », qui coû­tait encore bon­bon certes, mais qui indi­quait la direc­tion : sécu­ri­té – auto­no­mie — famille : tout-en-un ! Elon le dit, elle a obte­nu la meilleure note de sécu­ri­té jamais attri­buée ! Ques­tion voyage, des recharges ultra­ra­pides sont pré­vues et enfin y’a de la place dans la bagnole, on peut main­te­nant voya­ger avec les gniards.

On a l’air de rigo­ler mais, en juin 2015, trois ans après la livrai­son du pre­mier véhi­cule, les pro­prié­taires de la voi­ture ont par­cou­ru plus d’un mil­liard et demi de kilo­mètres en mode tota­le­ment élec­trique : une éco­no­mie d’un demi-mil­lion de tonnes de CO2. Ça a l’air de rien à côté des 40,9 mil­liards de tonnes émises en 2023, mais sacré nom, ces­sez de grom­me­ler bande de vieillards rin­gards, c’est un fameux début ! Et il faut bien se rendre compte que cette marche héroïque ne s’est pas faite sans sacri­fices : au deuxième tri­mestre 2015, Tes­la connais­sait une perte nette de 184 mil­lions de dollars.

Pour ne pas trop en faire, on serait ten­té de pas­ser sous silence la phi­lan­thro­pie de Tes­la. On ne cite­ra donc qu’un exemple : en 2017, l’en­tre­prise aide des zones se remet­tant de catas­trophes, en par­ti­cu­lier en ins­tal­lant des sys­tèmes de pro­duc­tion pho­to­vol­taïque et de sto­ckage pour réta­blir l’élec­tri­ci­té dans un hôpi­tal, après le pas­sage de l’ou­ra­gan Maria. Les mau­vaises langues ne manquent pas de susur­rer que, tiens, jus­te­ment, le pho­to­vol­taïque et le sto­ckage font par­tie des acti­vi­tés d’Elon. Et alors ? On ne peut pas don­ner ce qu’on n’a pas, n’est-ce pas ?

Puis, enfin, vint le Model 3, des­ti­né au mar­ché de masse et qui figure sur la liste des voi­tures élec­triques rechar­geables les plus ven­dues au monde pour l’an­née 2018.

Depuis les affaires se portent plu­tôt bien, avec des hauts et bas bien sûr : la Bourse ne com­prend pas tou­jours bien ce qui est bon pour le cli­mat. C’est pas pour dire, mais c’est comme les pauvres, dont on sait, ain­si que Coluche l’avait brillam­ment expli­qué, qu’ils ont mau­vais goût – faut avouer : quelle idée d’aller habi­ter dans une HLM. Eh ben les pauvres, ils roulent encore dans de vieilles caisses pour­ries qui te pol­luent tout. Fau­drait bien choi­sir : y’a des Tes­la, les gars !

Moi, j’ai plus qu’une chose à dire : vas‑y Elon, ne les écoute pas tous ces gens qui te font des pro­cès, te cri­tiquent pour des inci­dents soi-disant racistes dans tes usines et le prix du bon­heur cli­ma­tique : t’es sur le bon che­min ! Et cer­tains le savent bien, qui t’accordent un patri­moine de 182 et des pous­sières de mil­liards de dol­lars : « tu le vaux bien », comme on dit chez Bettencourt.

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