Ce qu’elles disent

Myriam Toews

Dans une com­mu­nau­té men­no­nite de Boli­vie, des femmes et jeunes enfants, se réveillent au matin endo­lo­ries, rouées de coup et vio­lées. La com­mu­nau­té de Molot­sch­na vit recu­lée du monde, sou­mise à des pres­crits reli­gieux … Les femmes sont loin d’y être l’égale de l’homme : elles sont anal­pha­bètes, ne parlent que la langue de la com­mu­nau­té, un dia­lecte alle­mand et sont iso­lées du monde exté­rieur. Au sein de la com­mu­nau­té, l’emprise du diable est la seule réponse plau­sible à cette situa­tion, mais les femmes de la com­mu­nau­té savent qu’il s’agit bien du fait des hommes. Le roman com­mence là, quand les femmes de la colo­nie, ayant décou­vert la véri­té, décident de se réunir dans le fenil d’un vieillard sénile, tan­dis que les hommes sont encore empri­son­nés. Le temps presse, elles ont 48h pour se mettre d’accord. Par­tir ou res­ter, fuir ou se battre. Deux-cents trente pages durant, elles argu­men­te­ront, tan­dis que l’instituteur du vil­lage (pas tout à fait un homme aux yeux des autres hommes) consigne leurs dis­cus­sions. Elles s’appuient sur leur igno­rance – fina­le­ment, vu qu’elles ne savent pas lire, elles ne font que croire ce que les hommes leur disent être écrit dans la Bible -, sur la reli­gion, sur la pos­si­bi­li­té de s’émanciper. Elles négo­cie­ront leur liber­té, leur jus­tesse, leurs oppo­si­tions et au final leur soli­da­ri­té. « Ce qu’elles disent » est un roman qui engage, l’on se prend à vou­loir répondre et s’identifier à leur com­bat pour la jus­tice, l’égalité et l’éducation de leurs enfants, filles et gar­çons. Un double huis-clos (une colo­nie recu­lée, iso­lée de Boli­vie et des femmes tenant concile) sur un fond reli­gieux peu ouvert à la remise en question.

Anne-Lise Cydzik

Ce qu’elles disent
Myriam Toews
Buchet Chastel, 2019

 

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