En 2010, la Belgique commémorait avec faste le Cinquantenaire de l’indépendance du Congo comme s’il s’agissait d’une fête nationale tandis que globalement la diaspora congolaise, installée depuis 1960 en Belgique, se sentait peu associée à cette commémoration, fait remarquer en introduction Sarah Demart qui coordonne, avec Gia Abrassart, Créer en postcolonie. Les 300 pages de cet ouvrage à voix et entrées multiples soulèvent de nombreuses problématiques liées à la postcolonialité et à la manière de pouvoir se positionner au plus jute face à l’héritage colonial. Du folklore racial à la décolonisation des esprits, des musées, de l’espace public, des écoles etc., de l’invisibilisation des afrodescendants aux nouvelles manières de se parler et (se) représenter en tant que belgo-congolais, de l’art et la littérature comme outil de résistance, de dissidence, d’affirmation et d’émancipation mais aussi de dépassement des tensions postcoloniales… Cette exploration se fait à travers les analyses et interventions de plus de quarante chercheurs·ses, artistes visuels ou plasticiens, écrivain·e·s et poètes, cinéastes et musiciens·nes comme Nicole Grégoire, Véronique Clette-Gakuba, Jean Bofane, Joëlle Sambi Nzeba, Pitcho Womba Konga ou Samy Baloji pour ne citer qu’eux. La vitalité artistique belgo-congolaise y est exposée loin de tout exotisme et montre comment l’art peut questionner cette histoire partagée entre la Belgique et le Congo, dont la diaspora est l’héritière. Avec cette approche critique postcoloniale, l’ouvrage apporte une contribution majeure au thème de la création en postcolonie et de la définition des identités afropéennes dans une société hautement racisée comme la nôtre.
Pierre LempereurCréer en postcolonie 2010-2015
Voix et dissidences belgo-congolaises
Collectif (Sous la direction de Sarah Demart et Gia Abrassart)
Bozar / Africalia, 2016