Nous sommes toutes et tous convertis à la consommation ! Voilà, résumé à gros traits, la conclusion générale de La fabrique du consommateur – Une histoire de la société marchande, le livre magistral d’Anthony Galluzzo. Chercheur spécialisé dans la culture de consommation, l’auteur reconstitue les grandes étapes de cette conversion, de la seconde moitié du 19e siècle aux long sixties du 20e siècle, une période qui s’étend jusqu’au milieu des années 70. C’est le progrès technique qui, en supprimant les distances grâce à la vitesse, a permis l’avènement de la consommation de masse. Les humains, les marchandises et leurs images commencent à circuler massivement. Il fallut donc créer un processus de fétichisation de ladite marchandise pour lui donner un capital symbolique dans la société. D’où l’invention de la marque et du marketing qui va avec. « En l’espace de 40 ans, de 1880 à 1920, note l’auteur, les marques se sont imposées en nouvel intermédiaire cognitif incontournable et ont complètement remodelé le système marchand au profit des grandes entreprises productrices. » De l’ère des « grands magasins » qui ont fait du mode de vie bourgeois l’étalon de la consommation au 19e siècle à l’utilisation de l’image stéréotypée de la femme ou au ciblage des jeunes et des enfants, ce bouquin est un voyage fantastique (et passionnant) dans les entrailles de la bête. Ou, au final, nous nous retrouvons nez à nez avec nous-mêmes…
Denis DargentLa fabrique du consommateur
Anthony Galluzzo
La Découverte/Zones, 2020