Lettres aux jeunes poétesses

En 1928, Rai­ner Maria Rilke publiait ses Lettres à un jeune poète (1937 pour la tra­duc­tion fran­çaise). Texte clas­sique et fort connu qui défend avec lyrisme la néces­si­té de réaf­fir­mer le carac­tère vital de l’écriture pour celui qui déci­de­ra d’en faire son acti­vi­té, la néces­si­té d’affiner ses per­cep­tions propres, de ren­for­cer une ins­crip­tion dans le monde qui passe par beau­coup de soli­tude. En 2021, Auré­lie Oli­vier réunit dans les Lettres aux jeunes poé­tesses 21 auteu­rices qui finissent d’inscrire l’écriture – s’il le fal­lait encore – à la croi­sée de tra­jec­toires indi­vi­duelles et de leur néces­saire déploie­ment dans le col­lec­tif, dans des lignes de trans­mis­sion, d’héritages qui pèsent autant qu’ils portent.

Le poète devient fémi­nin, fémi­niste et plu­riel, poé­tesses, voire « poé­tasses » (dixit Liliane Girau­don), s’adressant à un fémi­nin plu­riel, pas à un sexe, plu­tôt une posi­tion sociale, qui est un lieu de parole, un lieu de résis­tance, voire de révolte, un lieu d’invention et de trans­for­ma­tion de et par la langue, de et par la transmission.

Langue étrange, étran­gère par­fois (mal)menée par les auteu­rices elles-mêmes, décri­vant qui et quoi nour­rit cette pro­pen­sion à écrire en une langue et depuis une posi­tion qu’elles ont fait leur. Ces lettres s’adressent à toutes donc (et tous ceux qui aiment pren­dront le train) : aigui­ser ses sens et sa langue, se remon­ter les manches, trou­ver les mots pour (se) faire une place, en affir­mer cer­tains et s’é­man­ci­per d’autres. Aucun besoin d’avoir été touché·es par la grâce lit­té­raire pour deve­nir – comme l’écrit Liliane Girau­don, encore-elle – aus­si « inte­nable » que la poé­sie elle-même.

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