À quoi ressemblerait une ville dans laquelle les distances et les espaces rendraient possible la coexistence avec les bêtes sauvages ? En somme une ville qui ne serait plus pensée contre les animaux, ni d’ailleurs pour eux, mais avec eux ? C’est la question au centre de Zoocities, le dernier livre d’enquête philosophique de Joëlle Zask alors qu’aujourd’hui, on évolue peu à peu vers l’idée d’un partage de la ville avec des animaux qui pourraient y séjourner tout en restant sauvage. Ce faisant, nous augmentons paradoxalement leurs chances de pouvoir jouir paisiblement du milieu qui est le leur et de rester au loin, dans la profondeur des forêts. Alors même que nous constatons avec consternation l’extinction de milliers d’espèces et que nous nous demandons comment réensauvager la nature détruite par les activités humaines, les bêtes sauvages affluent. Voilà que la ville — conçue dans sa structure même pour les repousser — parvient à les attirer. Victimes d’un exode rural, opportunistes ou réfugiés climatiques, les animaux sauvages y cherchent plus qu’un refuge. Ils y cherchent, que nous le voulions ou non, un habitat. A l’instar de la ville antique qui s’organisait à partir du platane préexistant, la ville doit aujourd’hui inclure dans sa construction même les niches et les passages qui forment l’habitat des animaux. Elle doit devenir multispéciste. En se développant sous cette forme, elle est amenée non à aspirer la nature, mais à en créer. Ce livre passionnant trace un art d’inventer, entre vie humaine et vie animale, un habitat qui ménage une place à la part sauvage en nous !
Sabine BeaucampZoocities
Des animaux sauvages dans la ville
Joëlle Zask
Premier Parallèle, 2020