Le réalisateur franco-iranien Mehran Tamadon avait déjà tenté dans Bassidji une démarche de dialogue avec des membres des milices du régime de la République islamique. Cette fois-ci, il invite quatre mollahs et leurs familles à venir passer un week-end dans sa maison familiale pour discuter et débattre, pour tenter de vivre ensemble malgré leurs divergences philosophiques et religieuses… Le petit groupe s’installe et débat au travers de la métaphore de la maison comme symbole de tentative de vivre-ensemble. Un vivre-ensemble où pourraient coexister religieux et athées dans une conception laïque de l’espace public comme le projette Mehran Tamadon. Se succèdent les joutes verbales autour de grands thèmes classiques comme le désir, le voile, la laïcité, l’art et la littérature, la démocratie et le changement des institutions. Ces échanges à huis clos donnent à voir un ensemble de lignes de fracture de la société iranienne contemporaine. Le dispositif constituant une sorte de pastiche de la téléréalité, les moments de détente, eux aussi filmés, sont l’occasion d’observer de petits détails ultra significatifs. Parfois bonhommes, ces discussions ouvertes aboutissent quelquefois à de vrais moments d’entente. Mais très souvent tendues, elles portent jusqu’au malaise et aux haussements de voix car elle confronte deux visions diamétralement opposées de la vie. Le tournage de ce documentaire a d’ailleurs valu à son auteur de ne plus pouvoir retourner en Iran sous peine d’y rester coincé. Face au dogmatisme des théologiens, le titre du documentaire, « Iranien » est une manière de revendiquer haut et fort le fait qu’on peut être Iranien même si l’on est athée. Pas des plus simples dans le régime actuel…
Aurélien BerthierIranien
Documentaire de Mehran Tamadon
2014