Céline Wagner, au dessin et au scénario, s’est plongée dans l’univers d’Unica Zürn (1916 – 1970), une artiste et écrivaine qui, quoiqu’encensée par les surréalistes les plus illustres (Max Ernst, André Breton…) et proche d’Henri Michaux, est restée relativement méconnue. Céline Wagner s’est intéressée à la période parisienne d’Unica et elle s’est littéralement fondue dans son univers, plutôt déroutant… et même effrayant sur le plan biographique : étiquetée « schizophrène » Unica Zürn multiplie les séjours en clinique et les tentatives de suicide. L’œuvre de Céline Wagner est un exercice unique et fort réussi d’immersion dans ce que Dubuffet nommait l’art brut : « opération artistique toute pure, brute, réinventée dans l’entier de toutes ses phases par son auteur, à partir seulement de ses propres impulsions ». Les deux artistes – Wagner et Zürn – se rejoignent et parfois, dirait-on, se fondent (on conseille à ce sujet la magnifique postface de l’auteure) : de quoi interroger à nouveaux frais nos peurs et notre rapport à la « folie » ainsi qu’à l’univers psychiatrique à quoi elle se trouve de plus en plus réduite. À nouveau.
Jean-François PontegnieLa trahison du réel
Céline Wagner
La Boîte à Bulles, 2019