En 2020, une communauté d’activistes composée d’une couturière qui travaille sur des contrefaçons, d’un migrant au diplôme non reconnu, d’un italien chevronné ancien membre du Conseil National du Travail, d’un médecin irakien sur le point d’être expulsé, d’une écorchée vive hypersensible et d’un couple de paysagistes, perd l’un des leurs lors d’une manifestation, tombé sous les coups des forces de l’ordre. Peiné par ce drame, le groupe élabore tout un plan pour kidnapper les patrons du CAC 40, une gente exclusivement masculine venue pour une grande réunion à Paris. Dans quel but ce tour de force ? Obliger Emmanuel Macron dont iels ont subtilisé le numéro de téléphone à appliquer une réelle politique anticapitaliste. Ainsi, pour allocution télévisée, le Président – parodié – revêt l’habit et emprunte le discours d’un communiste internationaliste et écologiste, sur fond de crise économique grave et de ruptures sociales profondes au sein de la société française. Film politique ou de fiction ? Un peu des deux : iels font endosser à Macron un revirement politique à 360°, en engageant la nationalisation des principaux groupes, en abrogeant les dividendes, en annulant la dette des pays du tiers-monde et en régularisant l’ensemble des sans-papiers. Ce film dénonce les excès du néolibéralisme et on se prend à rêver à un Macron qui transformerait radicalement sa politique. L’un des activistes, Edgar tiendra la caméra, afin de relater leur action sous forme de documentaire, et de témoigner d’un ensemble de situations inadmissibles entrainant la désagrégation de la société au profit de seulement quelques-uns. Ces patrons du CAC 40 pendant leur détention d’un an et demi, vont réaliser un à un toutes les tâches de leurs employé·es subalternes : balayer, cuisiner, remplir des papiers administratifs, nettoyer etc. Ils cuiront des pâtes ou plutôt apprendront à les cuire ! Dans cette fiction, des humoristes comme Guillaume Meurice et Charline Vanhoenacker se sont prêté·es au jeu pour réaliser de fausses émissions de télévision ou de radio. Iels viendront conforter ainsi les intentions de Pierre Zellner, composer une fable politique. Ce film est parfois angoissant, haletant, parfois drolatique et pousse loin l’humiliation et l’absurdité que subissent ces grands patrons. Autant vous dire Basta capital, film original et très personnel, ne connaitra probablement son petit succès que de bouche-à-oreille, il est sorti uniquement en DVD. Sa trajectoire et son cheminement méritent cependant le détour.
Sabine BeaucampBasta Capital
De Pierre Zellner
Destiny Films, 2020